Aeger brevirostris – lundi 15 mai 2017

CHAQUE SEMAINE UN FOSSILE

Une crevette ardéchoise en terre jurassique

Par Bernard Riou, Mehdi Bennourine, lundi 15 mai 2017

Chaque semaine, retrouvez quelques spécimens de la collection de Bernard Riou exposés au Muséum de l’Ardèche. Ce lundi 15 mai 2017, notre star à nous c’est Aeger brevirostris, un spécimen fossile de langouste connu depuis 1923.

La parole est à la Science !

C’est dans un compte-rendu de la Société Royale de Belgique de 1923 que le paléontologue belge Victor Van Straelen décrit pour la première fois Aeger brevirostris. Cette crevette géante fait partie de la famille des Penaeidae,  crustacés  de la Classe des Malacostracés, ordre des Décapodes. Les représentants ressemblent à des crevettes. Dans une description courte de quelques paragraphes, le paléontologue décrit un spécimen issu des collections du muséum de Grenoble. Il remarque notamment un céphalothorax mince et lisse, terminé par un rostre court et large muni de dents rostrales.

L’étude de nouveaux spécimens par RP. Carriol et B. Riou en 1991 provenant du Lagerstatte de La Voulte sur Rhône confirme bien l’existence de ce genre dans les formations du Jurassique moyen ardéchois et précise la définition de cette espèce.

Cette espèce est de grande taille pouvant atteindre 30cm de longueur, caractérisée par un long rostre, la surface de la carapace est finement granuleuse. Le troisième maxillipède est armé de fines et longues épines multiples. Les trois premiers péréiopodes sont épineux et porteurs de longues pinces. Le céphalothorax est bordé ventralement par une carène submarginale. Le rostre est long, mince et granuleux sans épine infra- ou suprarostrale. Sur chaque flanc, le céphalothorax porte une épine hépatique bordée dorsalement par un sillon cervicale et ventralement par un sillon hépatique. Pour les appendices céphalothoraciques, les antennules présentent un très fort pédoncule. Le premier article est long et incurvé pour laisser de la place à l’œil. Les segments abdominaux ont un pleuron arrondi, légèrement caréné, porteur de soies. Au niveau de la queue le telson est pointu et très allongé, il porte un sillon longitudinal dorsal et une encoche latérale. Au niveau des appendices abdominaux les uropodes ont deux longues rames à l’extrémité distale arrondie et frangée de soies.

Le genre Aeger comprend près d’une vingtaine d’espèces dont l’espèce brevirostris au moins cinq espèces présentent un long rostre, malgré sont nom l’espèce décrite ici possède bien un rostre long observé sur plusieurs spécimens de la collection Riou du Muséum de l’Ardèche, elle se distingue de A. tipularius du Jurassique supérieur des formations de Solnhofen par la présence, sur la carapace ,d’un sillon inférieur et l’absence de dent infrarostrale.

Aeger brevirostris présente une morphologie proche des crevettes rouges géantes actuelles de la famille des Aristeidae qui vivent dans les zones abyssales comme par exemple le gambon écarlate Aristaeopsis edwardsiana (Johnson, 1868).

Bibliographie en français

Carriol (R.-P.) & Riou (B.) , 1991 – Les Dendrobranchiata (Crustacea, Decapoda) du Callovien de la Voulte-sur-Rhône. Annales de Paléontologie, t. 77, vol. 3, p. 143-160

Fischer (J.-C.), 2003 – Invertébrés remarquables du Callovien inférieur de la Voulte-sur-Rhône (Ardèche, France). Annales de Paléontologie, t. 89, vol. 4, p. 223-252

Charbonnier (S.), 2009 – Le Lagerstätte de La Voulte. Un environnement bathyal au Jurassique. Mémoires du Muséum national d’Histoire Naturelle, t. 199, p. 7-272

Charbonnier (S.), 2010 – Les gisements à conservation exceptionnelle dans les collections : l’exemple de La Voulte et de Montceau-les-Mines (France). Le patrimoine paléontologique. Des trésors du fond des temps, p. 95-112

Charbonnier (S.), 2011 – Le Lagerstätte de La Voulte-sur-Rhône : joyau marin du Jurassique moyen. Fossiles. Revue française de paléontologie, n°5, p. 5-20

L’œil du néophyte

Les crevettes présentées au Muséum de l’Ardèche sont particulièrement impressionnantes par leur taille ; ce sont de véritables langoustes ! Elles nous permettent de mieux appréhender l’histoire géologique du gisement de La Voulte et de s’approprier de manière beaucoup plus tangible l’histoire de ces roches.

« Lorsque l’on compare cette crevette aux actuelles on se rend compte que l’ensemble des détails sont conservés, il ne lui manque plus que la couleur et un peu de mouvement. »

Jérôme, visiteur du Muséum le 13/05/2017.

En savoir plus sur Aeger brevirostris

Retrouvez la fiche complète d’Aeger brevirostris publiée sur le site internet du Muséum National d’Histoire Naturelle
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